Onirelise

Onirelise

20 novembre 2023 21:03

Comment s'assurer qu'un aidant est apte ?  

Bonjour,

Je me permets de lancer une petite bouteille à la mer car je me pose des questions pour l'accompagnement de ma grand-mère maternelle atteinte de la maladie d'Alzheimer dont le diagnostic a été posé il y a deux ans.

Âgée de 83 ans, elle vit avec son mari du même âge qui est son aidant principal. Nous sommes plusieurs dans la famille à suspecter que cette relation soit abusive et soit le théâtre - sinon de maltraitance - du moins de négligence. Il est compliqué pour le reste de la famille (notamment ma mère) d'approcher ma grand-mère, et encore plus d'obtenir des informations sur son état de santé. Elle n'a que rarement "le droit" de sortir seule, ne peut téléphoner que sous l'écoute de son mari... bref, un tableau complexe.

Au gré des rares visites que nous concède le mari de ma grand-mère, j'ai pu constater des situations qui m'inquiètent. Défaut d'hygiène, de moins en moins d'attention portée aux vêtements (elle ne se vêtit qu'à contrecœur lorsque je me rends sur place), plus de coiffure, refus de couper les ongles ou de porter ses prothèses dentaires... étant soignante moi-même, cette situation m'attriste et m'inquiète fortement. Cette symptomatologie est certes classique d'un schéma d'Alzheimer, mais le mari de ma grand-mère ne semble pas apporter le soutien ou les soins nécessaires. Or, il est l'aidant principal et refuse tout soutien de la part de la famille qui souhaite en apporter (quant à la part restante, elle s'entend dire qu'il est parfaitement à même de s'occuper d'elle). C'est la source d'un déchirement familial très important.

Le couple ne sort jamais de son appartement, sauf pour le strict nécessaire alimentaire. Il n'y a aucune stimulation intellectuelle (arrêt de la lecture, des jeux...). Les conversations téléphoniques (systématiquement mises sur haut-parleur) sont rapidement avortées. Les rendez-vous médicaux (notamment chez le neurologue) sont en général assurés, mais pas systématiquement.

Ma grand-mère souffre d'un déclin rapide et flagrant de sa mémoire ainsi que de sa capacité à verbaliser. J'estime que son aidant principal (souffrant de la même négligence corporelle : cheveux et barbe jamais soignés, ongles extrêmement longs, pas de prothèse dentaire, jamais d'autre habillement qu'un pyjama...) n'est pas apte à remplir son rôle. Aucun diagnostic n'a été posé le concernant. 

Voilà qui m'emmène à ma question : y a-t-il un recours possible qui puisse conduire à une expertise du foyer afin d'attester (ou non) de la capacité du couple à fonctionner en autonomie ? Si oui, auprès de qui se tourner ? Existe-t-il des aides (psychologiques ? sociales ?) en vigueur pour les cas de familles qui se déchirent autour de la question d'aidants ?

Je pense qu'une aide à domicile a minima serait indispensable, en attendant à terme un rapprochement familial ou un placement. En plus d'être douloureuse à constater, la situation me paraît dangereuse pour ma grand-mère, qui paraît psychologiquement dépérir. Je n'ai que 24 ans, et j'ai vraiment du mal à trouver comment affirmer ma pensée auprès de mes tantes et de mon oncle qui n'ont pas l'air de saisir la gravité de la situation.

Aussi, je prends tout conseils que vous pourriez me prodiguer.

Je vous remercie par avance pour votre lecture,

A bientôt,

Onirelise

Réponses
1 message de membre 1 message d'expert
Marie-Hélène Isern-Réal Avocate 21 novembre 2023 11:43

Comment s'assurer qu'un aidant est apte ?  

Bonjour Onirelise,

Vous inquiétez parce que le mari de votre grand-mère (je suppose donc qu'il n'est pas votre grand-père) est défaillant dans sa fonction d'aidant. Parmi ses enfants, seules vous et votre mère vous préoccupez de la situation.

Vous demandez vers qui vous tourner pour avoir de l'aide.

Sur la négligence pour les soins médicaux, vous pouvez prendre contact avec le médecin traitant, si vous le connaissez, pour savoir s'il est satisfait de l'état de santé de votre grand-mère, ou au contraire, s'il a des difficultés pour faire exécuter ses prescriptions. Vous pourrez lui demander d'être plus vigilant en lui faisant part de vos inquiétudes et, s'il l'accepte, de vous tenir au courant.

Vous n'évoquez pas l'état du logement. Il est fréquent que les couples âgés se replient sur eux-mêmes en raison de la fatigue due à l'âge, ce qui crée une incurie aussi bien sur l'hygiène corporelle que sur l'entretien du logement et le suivi des affaires administratives. Ceci est à voir avec le banquier: non paiement des charges du logement, des impôts. Qui fait le marché et la cuisine ? Un regard sur ces questions pratiques vous éclaireront.

Les services sociaux de la mairie peuvent venir faire une évaluation de la gestion du ménage et de l'état du logement. S'ils constatent de graves carences, ils pourront faire un signalement et préconiser des auxiliaires de vie pour pratiquer les soins.

Cet éclairage personnel et administratif vous éclairera pour solliciter du juge de la protection des majeurs une protection pour votre grand-mère. Ce ne pourra pas être une habilitation familiale qui nécessite l'accord de tous.

Le tribunal de proximité du domicile de votre grand-mère vous donnera la liste des médecins habilités par le procureur de la République pour établir un  certificat médical circonstancié qui décrira l'état de dépendance de votre grand-mère. Vous déposerez ensuite un dossier auprès du juge de la protection des majeurs demandant votre nomination ou celle de votre maman comme protectrices de votre grand-mère.

Le médecin traitant, les services sociaux et le médecin habilité, vous permettront de justifier votre demande. Si vous trouvez la démarche trop complexe, vous pouvez faire appel à un avocat que vous trouverez sur le site : avocat.fr.

 

Onirelise

Onirelise

21 novembre 2023 12:26

Comment s'assurer qu'un aidant est apte ?  

Bonjour, 

Merci infiniment pour votre réponse détaillée. Elle m'est particulièrement précieuse.

Je prends bonne note de l'intérêt de contacter le médecin traitant. N'est-ce en revanche pas réclamer une rupture du secret médical que de s'enquérir de l'avis du médecin ? 

Concernant l'état du logement, il est difficile à appréhender car nous n'avons pas accès à la totalité des pièces lorsque nous nous rendons sur place. Rien ne m'a alertée pour l'instant en matière de salubrité.

Ce repli que vous évoquez me semble problématique pour eux deux : il y a désormais un refus de côtoyer d'autres personnes, un abandon des promenades quotidienne au motif qu'ils risqueraient de croiser du monde, ils passent des semaines entières sans mettre le nez dehors.

En matière de qualité de vie, je crois que ni ma grand-mère ni son mari ne se rendent plus au marché. Ils se déplacent toujours à deux à la supérette du quartier pour récupérer le nécessaire alimentaire. J'ai en revanche constaté qu'il leur était difficile de nous préparer un café ou un thé lorsque nous nous rendons sur place. Je suppose donc que la cuisine n'est plus faite, ou en tout cas pas dans des conditions optimales.

J'entends donc bien qu'une mise sous protection ne pourra se faire que de façon pluridisciplinaire après un état des lieux objectivé par les services sociaux.

Je vous remercie encore pour votre réponse et vous tiendrai au courant de la moindre évolution.

Si d'autres internautes souhaitent apporter leur expertise ou leur témoignage, n'hésitez surtout pas !

Belle journée.

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