Alysyr

Alysyr

3 novembre 2025 3:55

Suis-je une bombe à retardement ?  

Bonjour,

J'ai perdu il y a un peu plus d'une semaine ma belle-sœur atteinte d'un cancer en phase terminale. 

N'ayant pas de structure de soins chez elle, elle a été admise dans l'hôpital de ma commune.

Tout naturellement je suis devenue aidante dans ses papiers, courses... je lui rendais visite tous les jours à l'hôpital et même plusieurs fois par jour durant ses 2 derniers mois de vie, lorsqu'elle a commencé à perdre en autonomie.

J'ai vraiment aimé rester auprès d'elle, l'accompagner, la divertir tout en restant à ma place.

Sa famille étant loin, elle n'avait que très peu de visite. 

Aujourd'hui elle est partie, je l'ai accompagnée jusqu'à son dernier souffle malgré la difficulté pour moi de la voir décliner, de la voir partir.

Ce sont des images qui m'ont profondément marquée, et pourtant, bien que j'ai pleuré pendant qu'elle s'envolait, je suis aujourd'hui sereine.

Il me reste tout de même un petit couac de son décès. La veille de son départ, une odeur à commencé à envahir la chambre et j'avais vraiment du mal à rester. Je ne sais pas comment l'expliquer, ce n'étais pas une odeur désagréable mais comme envahissante à en imprégner toutes ses affaires.

Lorsqu'elle est partie, j'ai récupéré ses sacs pour les rendre à sa famille mais l'odeur a gagné ma voiture et aujourd'hui je pleure dès que j'ouvre la portière le matin ou j'ai la nausée.

Personne ne l'a sent cette odeur mais moi si. 

Ce qui m'inquiète le plus c'est que je sois aussi calme malgré tout ce que j'ai vu. Je nais pas pleuré lors de ses obsèques ni même à un autre moment jusqu'à maintenant, sauf à cause de l'odeur.

Je me tourne donc vers vous pour trouver une aide. Est-ce qu'il y a un risque que je craque olus tard ?

Par avance merci pour votre lecture et votre aide


Réponses
2 messages de membres 1 message d'expert
Isabelle Charret Médecin gériatre 3 novembre 2025 18:41

Suis-je une bombe à retardement ?  

Bonsoir Alysyr,

Si vous étiez une bombe à retardement, soyez certaine et surtout confiante que vous exploseriez de bien belles choses, en tous cas pas de celles qui font craquer ou qui tuent!

Quel beau témoignage que votre texte parlant de l’accompagnement que vous avez offert à votre belle-sœur ! Quelle chance a t’elle eue !

A présent, vous continuez dans votre vie, un peu orpheline d’une présence, de rituels, de SOIN prodigué à une autre.

Parlons de cette présence d’odeur puisque cela vous préoccupe.

Il n’est pas rare qu’après le décès d’un très proche, on ressente comme une présence ; certains disent entendre quelqu’un les appeler, leur poser une question ou le bruit d’une porte que la personne avait l’habitude de claquer (par exemple). Certains disent que le parfum porté est senti. Vous expérimentez le même phénomène sur le plan olfactif. Pourquoi ?

Lorsqu’on a été si proche longtemps dans de tels moments, tout le circuit cérébral des émotions est en alerte et les souvenirs émotionnels s’impriment très fort dans une zone du cerveau appelée l’Amygdale (pas celles de la gorge !). Ils se stockent dans une des nombreuses zones de la mémoire : le cerveau crée ainsi des souvenirs qu’on appelle une empreinte mnésique. Cette empreinte se réactive à la moindre occasion et entrainent avec elle le cortège d’émotions qui y sont réliées.

L’olfaction est le premier sens à créer des souvenirs même dans le ventre de la maman pour le bébé ! Les souvenirs olfactifs sont facilement crées car ce qui reçoit une odeur est directement, par un circuit court, connecté à l’amygdale.

Il est facile de comprendre pourquoi seule cette odeur vous émeut jusqu’à vous faire pleurer :

Lors des obsèques votre belle-sœur n’avait de « présence qu’inexistante » ; cela ne pouvait vous toucher, vous n’avez pas pleuré. Mais l’odeur, elle, vous la rend vivante, ne serait-ce que lors du dernier jour (où l’odeur s’est manifestée) et de son trépas : ça c’est triste car c’est réaliser que cette odeur vous la fait revivre, mais qu’hélas, votre belle sœur n’est plus !

Cette odeur était peut-être due à un pansement, une plaie, le plastique d’un matelas,un produit utilisé par les soignants ou autre (travaux ?). Il n’y a aucune utilité à utiliser un masqueur d’odeurs. Cette odeur s’évanouira tranquillement, avec le temps. Peut-être la ressentirez vous lors d’une visite à l’hôpital, lors d’un pansement, au cabinet du médecin ou quelque part ailleurs et vous vous direz : « cela me rappelle des moments ineffaçables » et ce sera tout !

Si vous ressentez le besoin de vous déstresser, lisez l'article sur notre site : "Et si on méditait?"

Merci beaucoup,

Bien à vous

 

 


isaflo

isaflo

4 novembre 2025 20:17

Suis-je une bombe à retardement ?  

Bonsoir Alysyr,

je me permets de me joindre à cet échange.
Tout comme l'écrit le Docteur CHARRET, vous avez vécu avec votre belle soeur tellement de moments, partager des choses, que lorsque vous dites ne pas avoir pleuré, je l'ai vécu après m'être occupée de mon papa durant 3 ans et 4 mois suite à un AVC. Le jour de son décès, mon frère s'est littéralement jeté contre un mur en larmes, ma maman s'est effondré sur son mari et moi, j'étais seule à le recouvrir, fermer les yeux, la bouche, faire toutes les démarches, etc.. le jour de son enterrement également, pas une larme.. etc.

Tout comme vous, lors du tri de ses affaires, je ressentais qq chose comme une présence, voire une force, je n'avais pas de tristesse à vider les placards comme on dit et au contraire de mon frère, ma maman...

En premier lieu, j'ai culpabilisé en me disant que je n'étais pas "humaine", que j'allais comme vous dites avoir un retour et voyez vous cela fait 5 ans et demi et rien.. Maintenant je m'occupe de ma maman, je me dis encore que je vais certainement lorsqu'elle sera partie, que je vais exploser.... mais au final, ce sera identique, le corps est une chose merveilleuse !

voilà, en espérant ne pas avoir été trop longue, mais sachez qu'ici, une bienveillance est toujours constante, chez "aidons les nôtres"


Alysyr

Alysyr

5 novembre 2025 0:38

Suis-je une bombe à retardement ?  

Bonjour à tous,

Merci beaucoup pour vos retours rapides et bienveillants 😊

Vous avez su apporter des réponses à mes questions et me conforter dans mon idée de départ.

Je pense que la voir partir à petit feu pendant autant de jour a développé chez moi une sorte de rejet de l'odeur de l'hôpital. Il faut dire aussi que j'ai du la sentir tous les jours pendant plusieurs semaines. Et certainement qu'elle me ramène au moment où elle était encore avec nous.

Ça me rassure de savoir que je n'aurai certainement pas de contre coup de cette épreuve.

Nous avons subi des ascenseurs émotionnels tous les jours toutes les 2.

J'espère ne choquer personne, mais après près d'une semaine sans pouvoir ouvrir les yeux, ni bouger, ni articuler à ne pas la comprendre, son départ était devenu nécessaire pour qu'elle soit enfin libre.

On voit tellement la personne dans la douleur psychologique d'être prisonnière de son propre corps que ça en devient presque insupportable d'impuissance.

Je pense que l'accompagner m'a permis d'aller jusqu'au bout du processus de l'acceptation qu'il n'y avait pas d'autre issue et c'est pourquoi depuis son départ je suis bien.

Merci beaucoup pour vos partages et vos conseils. J'ai pu trouver ici grâce à vous plus de sérénité 😊


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