Partie 2 – Aidance & emploi : quelle valorisation des compétences ?
Le 30 mars dernier, la rencontre « Aidance, compétence et emploi » initiée par AG2R LA MONDIALE, l’Association Française des Aidants et le Cercle Vulnérabilités et Société avait pour objectifs de présenter les résultats d’une étude exploratoire pour identifier les compétences acquises par les proches aidants durant les situations d’accompagnement, évaluer les nouveaux besoins des recruteurs et des entreprises et de développer les premiers référentiels et outils permettant de mieux comprendre et valoriser ces compétences.
Françoise Sariban a été aidante de sa maman pendant 18 ans. Elle est membre du Conseil d’Administration et du bureau de l’Association Française des Aidants et a participé à ce travail sur les compétences des personnes en situation d’aidant. Nous avons souhaité avoir son point de vue sur ce qui a été présenté.
Comment réagissez-vous au travail qui a été présenté le 30 mars dernier ?
L’étude Aidants, compétences et emploi comble un vide. Elle apporte un changement radical de regard sur l’image communément partagée des aidants. On passe d’une vision majoritairement négative à une représentation positive.
En montrant comment des aidants prennent en charge les multiples activités liées au quotidien de leur proche, l’étude met en relief les compétences informelles qu’ils développent, souvent dans l’urgence, car ils n’ont pas le choix.
Cette vision dynamique devrait bousculer – et j’espère positivement- beaucoup de choses pour les aidants.
Aviez-vous des a priori avant de participer à cette étude ? Comment votre jugement a-t-il évolué suite à la restitution de l’étude ?
J’ai participé à cette étude avec enthousiasme. Comme aidante de ma mère durant 18 ans, j’avais eu l’intuition que dans les multiples activités que je découvrais, je construisais de nouvelles compétences. Il se trouve que, dans ma vie professionnelle, j’avais déjà travaillé sur le repérage des compétences des salariés. J’ai toujours en tête l’idée que la compétence liée à un poste de travail se construit dans l’activité et dans l’action. Et durant ma vie d’aidante, je me suis souvent dit que j’aimerais bien prendre du recul et repérer mes nouvelles compétences.
Le 30 mars, avec la présentation des résultats de l’étude, des compétences liées à l’aidance sont identifiées. Ma participation à ce travail m’a permis de valider mon intuition. Ce qui est très satisfaisant.
Après l’identification des compétences développées, l’objet de l’étude était de montrer comment celles-ci sont transférables dans l’emploi. D’habitude on renvoyait les aidants sur les métiers du « Care », c’est-à-dire les métiers de la santé, du travail social. Et je n’étais pas d’accord avec cette assignation. Pour quelle raison un aidant qui occupait une fonction dans une entreprise dans le commercial ou dans le marketing par exemple, aurait envie d’orienter sa vie professionnelle vers le soin ? Cette représentation agissait comme un frein.
Les résultats de l’étude vont permettre aux proches aidants d’enrichir leurs portefeuilles de compétences et de nouvelles pistes s’ouvrent à eux. C’est un grand changement. Rajoutons aussi qu’à l’issue de ce travail sur soi, les proches aidants seront mieux armés pour développer des arguments qui vont valoriser leur expérience d’aidant. On est sorti du vide et de l’invisible !
Vous avez participé au 2nd atelier : acteurs de l’accompagnement : quel rôle pour valoriser les compétences des poches aidants ? Les acteurs de l’accompagnement se sentent-ils « à l’aise », légitimes pour accompagner et orienter les personnes aidantes qui travaillent ou souhaitent reprendre un travail ?
J’ai choisi de participer à l’Atelier 2 pour entendre les réactions des acteurs de l’accompagnement. Dans l’ensemble, ils ont été « bluffés » par les résultats. On est dans un changement de représentation. On passe d’une représentation à tonalité négative à une représentation positive, dynamique qui ouvre des pistes d’emploi en dehors des métiers du soin.
Les structures ont été très sensibles à la présentation des outils qui vont compléter ceux qu’elles utilisent déjà et ont l’avantage d’avoir été conçu pour la population des proches aidants.
Elles ont aussi souligné leur besoin de formation à la fois sur la problématique des aidants et sur la prise en main des outils.
Comment voyez-vous la suite de ce travail ?
AG2R LA MONDIALE a déjà annoncé le lancement d’un groupe pilote de salariés en situation d’aidants et d’autres structures présentent le 30 mars pourraient rejoindre cette phase de test.
Je pense aussi à d’autres actions pour répondre aux besoins des professionnels de l’accompagnement et du recrutement, comme des ateliers de présentation des résultats de l’étude, et des ateliers de formation aux nouveaux outils.
Pour nous aidants, j’imagine plusieurs temps de travail. Un atelier pour mettre en mot son expérience d’aidance. Puis une phase d’identification des compétences informelles, et enfin un temps pour voir comment les compétences nouvelles vont enrichir le profil professionnel actuel. Et enfin, l’étude elle-même pourrait être approfondie par des recherches complémentaires, par exemple sur le sujet de la construction des compétences.
Elle ouvre sur de nombreuses pistes d’application !
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