Répercussions émotionnelles du rôle de l’aidant : urgence !
L’exercice de l’aidance requiert, entre autres, dévouement, patience et courage. S’il apporte beaucoup humainement, il n’est pas exempt de difficultés. Il est bien connu qu’elles peuvent perturber l’équilibre physique, psychique et social de l’aidant.
La proximité et la présence quotidienne auprès d’un proche peuvent avoir des conséquences émotionnelles moins connues, mais tout aussi délétères voire très graves. Ces troubles sont fréquents chez les acteurs de la relation d’aide (soignants, psychologues des traumatismes…) et le binôme aidant/aidé n’y échappe pas.
Émotion : état affectif qui se met en mouvement autour de soi, en soi, entre soi. Joie, colère, stupéfaction, peine, peur, sérénité en sont des exemples et peuvent se décliner et se manifester en diverses intensités.
La contagion émotionnelle est le transfert des émotions d’une personne vers une autre. L’aidé est la personne émettrice d’émotions, l’aidant, la personne réceptrice qui les « attrape » comme une maladie contagieuse. Malheureusement, colère, désespoir, angoisses, peurs sont plus en cause que les émotions positives, d’autant plus que l’aidant est fragile, fatigué et que les émotions exprimées sont intenses. Leur mise à distance, donc leur gestion, n’est plus possible : aidé désespéré, aidant désespéré, aidé colérique, aidant colérique…
C’est seulement au moment de la disparition de l’émotion transmise que l’aidant arrêtera de « se mettre à la place » de l’autre et pourra être soulagé. Mais cette situation peut devenir chronique et rendre la vie quotidienne insupportable.
Quand la fatigue et l’usure prennent le dessus
L’usure de compassion ou fatigue d’empathie est « liée à des préoccupations excessives et permanentes, une tendance à se mettre totalement à la place de l’autre, à un désir profond d’aider quitte à s’oublier. C’est une usure qui s’installe de façon lente et graduelle et qui se produit lorsque la personne qui aide n’est plus capable de se ressourcer et de retrouver son énergie ».(1)
Elle se manifeste par :
- un intense découragement, un sentiment d’impuissance ;
- un épuisement et une lenteur à effectuer les tâches, à s’organiser au quotidien ;
- une inquiétude permanente ;
- un sentiment de détachement vis-à-vis de son proche jusqu’à vouloir l’oublier ;
- une émotivité forte au début puis émoussée avec un comportement « zombie » ;
- un besoin de s’isoler, ne plus partager, un désir de fuite.
Cette démobilisation vécue comme une douleur terrible peut parfois conduire à se laisser mourir.
Le traumatisme d’appropriation est exceptionnel. Il se produit lorsque l’aidé a vécu un événement très grave que l’aidant va vivre totalement psychiquement et émotionnellement jusqu’à en ressentir le vécu physiquement (manifestations de terreur, de tremblements de froid, de faim suite à la fugue du proche avec égarement dans un froid glacial).
Quelques axes simples et efficaces pour s’en sortir
Où et avec qui ?
Toutes les associations d’aidants proposant une écoute, forums « Aidons les nôtres », psychologues de la relation d’aide…
Quoi faire ?
- Identifier le trouble et le différencier d’un état dépressif ;
- Être aidé(e) à modérer la fusion entre soi et l’autre : la personne dont on s’occupe n’est pas soi-même ;
- Trouver un ou deux moments de diversion hebdomadaires, rien que pour soi : promenade, esthétique, gourmandise, activité artistique, activité corporelle…
- Apprendre à détendre son stress intérieur par des techniques de respiration (2) (3).
Si le partage des émotions est une caractéristique de toute vie en société, elles peuvent submerger, envahir et anéantir le proche aidant, l’empêchant d’exercer son rôle auprès de son aidé.
A lire aussi :
- (1) Fortier (2018) Usure de compassion : jusqu’où aller sans se brûler ? Presses Inter Universitaires, Québec ↩︎
- (2) L’incroyable pouvoir du souffle Stéphanie Brillant ↩︎
- (3) Application de respiration détente : Respirotec, Respirelax ↩︎
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