oynap

23 juillet 2021 13:01

Qui signe le contrat de résidence avec un Ehpad pour une personne sous tutelle partagée ?  

Bonjour,

J’aimerais poser une question sur le contrat de résidence en Ehpad d’une personne qui a, d’abord, été sous sauvegarde de justice (avec mandataire spécial), puis sous tutelle partagée (tuteur aux biens, se trouvant être l’ex-mandataire spécial, et tuteur à la personne). Pendant la sauvegarde de justice, le contrat de séjour a été signé entre l’Ehpad et le mandataire spécial pour une « durée indéterminée », le mandataire prenant toute une série de décisions « très intimes » (concernant, par exemple, les autorisations de sortie ou les dispositions en cas de décès). Mais, quand la tutelle partagée a été décidée par le Juge, ce contrat de séjour n’a pas été actualisé, et le choix de l’Ehpad n’a pas été confirmé.

Si j’ai bien compris, le choix du lieu de vie, l’organisation de la vie quotidienne, les soins, les prestations de bien-être... sont du ressort de la personne protégée en étroite collaboration avec son tuteur à la personne. Comment actualiser le contrat ? Le refaire ? Ajouter des avenants/annexes ? Qui doit le signer, le tuteur à la personne ou le tuteur aux biens, sachant, si j’ai toujours bien compris, que la résiliation éventuelle serait du ressort de la personne protégée toujours en étroite collaboration avec son tuteur à la personne (ce que ne permettrait pas un contrat signé par le tuteur aux biens, et d’autant plus si ce dernier « ne voulait pas voir partir la personne protégée ») ? Que disent les textes, s’ils existent (?), s’ils disent quelque chose, je n’arrive pas à trouver une information précise.

Par avance, merci pour votre réponse.

oynap

Réponses
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Marie-Hélène Isern-Réal Avocate 23 juillet 2021 18:36

Qui signe le contrat de résidence avec un Ehpad pour une personne sous tutelle partagée ?  

Bonjour oynap

A propos de l’entrée en EHPAD d’une personne sous tutelle, vous évoquez des abus de pouvoir d’un mandataire professionnel aussi bien au cours de la période de sauvegarde qu’après avoir été nommé tuteur aux biens.

Le code civil ne précise pas qui doit assurer la constitution des dossiers administratifs comme le contrat d’hébergement et surtout son annexe qui porte sur les soins et l’organisation de la vie quotidienne.

Il faut aller chercher dans le code de la santé publique et dans le code de l’action sociale et des familles pour avoir une réponse, devenue très claire depuis une ordonnance du 11 mars 2020.

Concrètement :

- au cours de la période de sauvegarde, le mandataire qui a appréhendé les comptes pour payer les charges a le pouvoir de valider le contrat d’hébergement, au moins pour garantir le paiement en contrepartie puisqu’il a la main sur les comptes. Mais le directeur doit s’assurer que la personne est consentante, ce qui, évidemment, est illusoire puisque la plupart du temps, elle n’a pas le choix.

En revanche, le mandataire spécial ne peut rien décider concernant les sorties ou le contrat obsèques car il n’en a pas légalement le pouvoir.

- Ensuite, sous tutelle, selon l’ordonnance du 11 mars 2020, qui a modifié les articles L1111-2, L111-4, L1111-7, L1111-11, etc. du code de la santé publique, le tuteur aux biens n’a aucun pouvoir concernant les soins de la personne en tutelle.

Il en est de même dans le code de l’action sociale et de familles, qui a été aussi modifié par l’ordonnance du 11 mars 2020.

D’une manière générale, il faut deux conditions : que le tuteur soit expressément nommé tuteur à la personne, ET que la personne soit déclarée inapte à exprimer sa volonté. Ainsi le tuteur sans autre précision, ou le tuteur aux biens ne peuvent intervenir pour l’hébergement.

Par exemple : l’article L232-22 CASF prévoit : « Lorsque le bénéficiaire de l'allocation personnalisée d'autonomie est hébergé dans un établissement de santé pour recevoir des soins de courte durée, de suite ou de réadaptation, le président du conseil départemental en est informé par le bénéficiaire, le cas échéant la personne chargée d'une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne, ou l'équipe médico-sociale mentionnée à l'article L. 232-3. En fonction de la nouvelle situation de l'intéressé, le président du conseil départemental peut réduire le montant de l'allocation personnalisée d'autonomie ou en suspendre le versement dans des conditions fixées par voie réglementaire. »

Ainsi, s’agissant d’une mesure administrative et financière, comme la réduction de l’APA, le code de l’action sociale et des familles prévoit que la démarche relève exclusivement du tuteur à la personne ou de l’équipe médico-sociale.

La référence principale se trouve dans l’article L311-3 CASF qui concerne les droits des usagers des services sociaux et médico-sociaux : « L'exercice des droits et libertés individuels est garanti à toute personne prise en charge par des établissements et services sociaux et médico-sociaux. Dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, lui sont assurés :

1° Le respect de sa dignité, de son intégrité, de sa vie privée, de son intimité, de sa sécurité et de son droit à aller et venir librement ;

2° Sous réserve des pouvoirs reconnus à l'autorité judiciaire et des nécessités liées à la protection des mineurs en danger et des majeurs protégés, le libre choix entre les prestations adaptées qui lui sont offertes soit dans le cadre d'un service à son domicile, soit dans le cadre d'une admission au sein d'un établissement spécialisé ;

3° Une prise en charge et un accompagnement individualisé de qualité favorisant son développement, son autonomie et son insertion, adaptés à son âge et à ses besoins, respectant son consentement éclairé qui doit systématiquement être recherché lorsque la personne est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision. A défaut, le consentement de son représentant légal s'il s'agit d'un mineur ou, s'il s'agit d'un majeur faisant l'objet d'une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne, de la personne chargée de cette mesure, qui tient compte de l'avis de la personne protégée, doit être recherché ;

4° La confidentialité des informations la concernant ;

5° L'accès à toute information ou document relatif à sa prise en charge, sauf dispositions législatives contraires ;

6° Une information sur ses droits fondamentaux et les protections particulières légales et contractuelles dont elle bénéficie, ainsi que sur les voies de recours à sa disposition ;

7° La participation directe de la personne prise en charge à la conception et à la mise en œuvre du projet d'accueil et d'accompagnement qui la concerne. Cette personne bénéficie de l'aide de son représentant légal, s'il s'agit d'un mineur ou, s'il s'agit d'un majeur faisant l'objet d'une mesure de protection juridique à la personne qui n'est pas apte à exprimer sa volonté, de la personne chargée de cette mesure, qui tient compte de son avis. »

Ainsi, seul le tuteur à la personne peut assister la personne concernée et notamment pour déterminer et consentir au projet d’accueil et d’accompagnement.

Le tuteur à la personne ne peut pas consentir aux lieux et place de la personne concernée, sauf si elle est déclarée inapte à exprimer sa volonté.

Enfin, l’article L471-7 est très clair : « Afin de garantir l'exercice effectif des droits mentionnés aux articles L. 311-3 à L. 311-9, lorsque la personne chargée d'une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne à l'égard d'un usager d'un établissement mentionné à l'article L. 472-6 est un mandataire judiciaire à la protection des majeurs mentionné au même article :

1° Les documents mentionnés aux trois premiers alinéas de l'article L. 311-4 sont personnellement remis à la personne protégée ou, dès lors que l'état de cette dernière ne lui permet pas d'en mesurer la portée, à un membre du conseil de famille s'il a été constitué ou, à défaut, à un parent, un allié ou une personne de son entourage dont l'existence est connue ;

2° La participation directe de la personne à l'élaboration du document individuel de prise en charge mentionné à l'article L. 311-4 est requise à moins que son état ne lui permette pas d'exprimer une volonté éclairée ;

3° La faculté mentionnée à l'article L. 311-5 est exercée directement par l'intéressé. Lorsque son état ne lui permet pas d'exprimer une volonté éclairée, elle est exercée par un membre du conseil de famille s'il a été constitué ou, à défaut, par un parent, un allié ou une personne de son entourage dont l'existence est connue ;

4° L'association des personnes protégées au fonctionnement du service ou de l'établissement leur est garantie par leur participation directe au conseil de la vie sociale prévu à l'article L. 311-6 ou, lorsque leur état ne le leur permet pas, par d'autres formes de participation prévues par le même article.

Le présent article s'applique lorsque la personne chargée d'une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne à l'égard d'un usager d'un établissement ou d'un service social ou médico-social mentionné au I de l'article L. 312-1 est un mandataire judiciaire à la protection des majeurs mentionné au 14° du même I, géré par cet établissement ou ce service ou par le gestionnaire de cet établissement ou de ce service s'il n'est pas doté d'une personnalité morale propre.

Seul le tuteur à la personne intervient et le rôle des aidants est valorisé.

Ainsi le tuteur aux biens n’a le pouvoir d’intervenir ni pour les soins médicaux ni pour les contrats d’hébergement ou de service.

En vertu de ces textes, concernant la situation que vous évoquez, le tuteur à la personne nouvellement nommé peut intervenir pour faire modifier les mesures prises pendant la période de sauvegarde, car le mandataire spécial n’avait aucun pouvoir pour prendre des décisions de fin de vie, contrat obsèques, sorties, etc.

Pour le contrat d’hébergement, le tuteur à la personne doit faire valoir ses pouvoirs à la direction et se faire communiquer le contrat et l’annexe et les revoir s’il considère que c’est nécessaire.

 

 

 

 

 

 

 

 

Louis

Louis

25 août 2021 16:47

Qui signe le contrat de résidence avec un Ehpad pour une personne sous tutelle partagée ?  

Bonjour,

Pour rebondir sur la question d’oynap, je suis moi-même tuteur à la personne de mon père, et je me pose des questions concrètes sur comment doit être rédigé le contrat d’hébergement avec l’Ehpad, d’autant que j’ai noté une « proximité » entre le tuteur aux biens et l’Ehpad. L’Ehpad m’a proposé de signer un contrat de résidence entre son directeur et la personne protégée « représentée par », à la fois, son tuteur à la personne et son tuteur aux biens (les deux noms, coordonnées et qualités des deux tuteurs sont écrits côte à côte), tous deux regroupés sous le terme « le représentant légal ». Dans les « coordonnées des personnes à prévenir », figurent les deux tuteurs. Question : ainsi rédigé, ce contrat respecte-t-il bien les droits de la personne protégée et de son tuteur à la personne ? Je m’interroge : en cas de déménagement de la personne protégée, le tuteur à la personne peut-il résilier seul le contrat ou doit-il, du fait de ce contrat de représentation « à double tête », avoir également l’aval du tuteur aux biens ? Autre solution rédactionnelle, en conformité avec les textes que Me Isern-Réal a cités, le tuteur à la personne doit-il demander impérativement à signer seul, comme « représentant légal de la personne protégée », avec l’Ehpad ? Et si oui, de quelle manière sera indiqué, dans le contrat, le rôle du tuteur aux biens ? Est-ce, et est-ce suffisant, par une annexe dans laquelle le tuteur aux biens confirme son accord de prendre en charge financièrement les prestations définies par le tuteur à la personne (bien évidemment en adéquation avec les besoins et souhaits exprimés de la personne protégée) ? J’ai cherché des exemples de contrat de résidence d’Ehpad qui concernerait des personnes sous tutelle partagée mais n’ai pas réussi à en trouver… Est-ce parce que les tutelles partagées sont « assez nouvelles » ? J’ai l’impression, ayant par ailleurs d’autres difficultés avec le tuteur aux biens, de « payer les pots cassés ». Je serais heureux si l’on pouvait m’éclairer. D’avance, grand merci ! louis

Marie-Hélène Isern-Réal Avocate 26 août 2021 12:49

Qui signe le contrat de résidence avec un Ehpad pour une personne sous tutelle partagée ?  

Bonjour Louis,

Vous vous interrogez sur la répartition des rôles entre le tuteur à la personne et le tuteur aux biens au moment de la signature du contrat d’hébergement en EHPAD que vous jugez inadapté à la nouvelle répartition des rôles telle que définie par le code de la santé publique et le code de l’action sociale et des familles.

Vous avez raison, le contrat est inadapté. Les modèles ignorent la répartition des pouvoirs. Le droit sanitaire et social persiste à ignorer les catégories définies par le droit civil. Les directeurs ne sont pas formés au droit de la protection des majeurs.

Concrètement, vous êtes tuteur à la personne, donc décisionnaire pour votre père. C’est vous qui devez signer le contrat et surtout son annexe comportant le plan personnel individualisé. Vous devez être seul en principe comme personne à prévenir.

Mais le tuteur aux biens doit aussi participer, car il doit prendre l’engagement de payer. Rien ne vous interdit de compléter le contrat et de mentionner que vous signez comme tuteur à la personne, ayant mission de personne de confiance, et que le tuteur aux biens signe pour paiement des frais d’hébergement.

En cas de difficultés, rappelez les textes que j’ai cités.

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