irénée

26 février 2024 19:50

refus de soins  

Bonjour, 

Mon épouse souffre d'Alzheimer à un état avancé et refuse généralement catégoriquement les soins que je cherche à lui donner.  C'est souvent un réel problème de l'aider à s'habiller le matin, de lui faire prendre ses médicaments, de lui couper les ongles, de soigner ses cors aux pieds, de lui couper les cheveux, de lui faire prendre une douche ou un shampoing ..  J'ai réduit ces soins au strict minimum, mais c'est toujours une scène épouvantable  quand je dois passer à l'action, avec cris de révolte, menaces, pleurs, chantage au suicide et j'en passe..

Je le fais cependant sans animosité, conscient de son état cérébral et de son irresponsabilité mais avec une fermeté qui exige souvent la contrainte physique.

Quelques minutes après ces séances dantesques, ma tendre épouse retrouve son calme et la vie normale reprend son cours.

Je suis sûr qu'elle ne serait pas mieux soignée par des aides-soignants ( qu'elle ne supporterait d'ailleurs à aucun prix ) ni dans un établissement spécialisé (où moi-même ne saurais pas quels traitements on lui inflige)

Y a t il d'autres solutions que de continuer à la soigner, malgré elle, comme je le fais actuellement ? 

Et quels sont les risques que je cours aux yeux de la loi, du fait de cette "violence" que je suis contraint d'utiliser, si un accident survenait ou si les voisins me dénonçaient pour actes de violences conjugales.

Avec mes remerciements.

 

 

Réponses
1 message de membre 3 messages d'experts
Isabelle Charret Médecin gériatre 28 février 2024 16:41

refus de soins  

Bonjour Irénée,

Quel questionnement terrible pour vous ! Il faut de la lucidité pour l’aborder !

Vous soulevez le souci d’être mis en cause pour ce que vous nommez ( ou que les autres nommeraient) violences exercées sur personne vulnérable.

N’y allons pas par quatre chemins : votre épouse ne peut pas comprendre ce qui se passe en raison de sa maladie à un stade avancé, mais elle requiert absolument tous les soins que vous lui prodiguez. Vous êtes dans une démarche obligatoire et qui lui offre de maintenir sa dignité sur l’hygiène, son allure et donc son mieux. Vous le dites : « Après, retour à la normale ».

Voici quelques réflexions dont la pratique depuis fort longtemps est presque toujours couronnée de succès. Car il existe fort heureusement des techniques appliquées par des établissements, des soignants sérieux, formés et persuadés que « bien faire est tout bénéfice pour soignés, proches et soignants » :

Même si la maladie est avancée, elle ressent beaucoup de choses, bien que peut-être elle ne puisse pas les nommer.

  • Soit elle sent qui vous êtes et elle refuse que vous exerciez sur elle une intrusion dans son intimité.
  • Soit elle vous prend pour un étranger et elle est terrifiée.
  • Soit cela réveille de mauvais souvenirs.
  • Soit elle refuse de passer la main sur des choses qu’elle ne sait plus faire.
  • Soit les conditions ne lui conviennent pas : froid, complètement nue, sensation de confinement dans un espace étroit et peur.

Vous avez là des petits curseurs à bouger pour ne pas avoir à vivre des moments exténuants, qui d’ailleurs finissent par vous poser question :

  • La toilette complète n’est pas toujours obligatoire quotidiennement.
  • Le change et la toilette intime sont mieux vécus si le reste des habits n’est pas ôté.
  • Faire tenir un objet rassurant, mettre de la musique, réchauffer par des serviettes chaudes, aide beaucoup.
  • Et peut-être que votre épouse serait plus à l’aise avec un(e) intervenant(e).

Quand à la « violence », mettez des mots :

  • Tu vas te sentir agressée n’est-ce-pas ? Pourtant je ne le souhaite pas ! Aide moi à t’aider un peu ! Faisons cette toilette ensemble ! Il faut qu’on soit beaux tous les deux !
  • Oh ! ces cris ! Est-ce que ça te soulage ? pourquoi ne pas chanter ? Respirer ?
  • Ce sont de mauvais souvenirs ?

Et puis, cheminez un peu plus loin : Pourquoi je fais autant et dans ces conditions si dures ? Est-ce que je ne pourrais pas passer la main une fois ou deux ?

Au vu du questionnement dont vous nous faites part, structurez une belle technique de soins, formez-vous auprès d’organismes, lisez quelques ouvrages et vous apprendrez beaucoup de choses qui vous aideront car elles ne s’inventent pas. Ne restez pas seul à tout gérer.

Et vous serez protégés de toutes critiques.

Vous faites au mieux, certainement fort bien, mais, si les proches aidants prennent en charge des soins, ils n’en sont pas moins aidants non professionnels.

Vous allez y arriver fort bien

Bien à vous

 

Des références :

- Formations Médéric Alzheimer, France Alzheimer et tant d’autres

- Nos articles sur les soins (« Moment de la toilette : et si on voyait les choses autrement »)

- La BIBLE du soin aux personnes atteintes de troubles cognitifs : Ouvrage d’Yves Gineste et Rosette Marescotti : « Humanitude »

Marie-Hélène Isern-Réal Avocate 2 mars 2024 18:45

refus de soins  

Bonjour irénée,

Vous craignez une dénonciation pour "mauvais traitements" et je vous comprends. Je vous comprends aussi de vouloir garder la main.

Qu'est-ce que vous appelez un accident : une chute parce que votre épouse se débattrait et que vous ne pourriez pas la retenir, des bleus aux bras parce que vous la serrez même pas trop fort ?

Si vous aviez une dénonciation pour maltraitance, le risque serait qu'on vous enlèverait votre épouse pour l'héberger dans un établissement spécialisé. Donc, le risque serait pour elle de perdre votre présence.

Mais avant, il y aurait enquête à domicile, la police interrogerait votre médecin traitant, les aides à domicile, vos parents et amis. Une expertise médicale rechercherait des os cassés, des hématomes profonds, etc. Vous n'êtes pas dans le schéma des violence conjugales. Les procureurs de la République savent faire la part des choses.

Ne vous inquiétez pas et expliquez aussi la situation aux voisins qui, je suppose, peuvent comprendre.

 

irénée

4 mars 2024 18:36

refus de soins  

Merci beaucoup pour vos réponses, tant du point de vue médical que du point de vue légal.

Ce que j'avais pu lire ou entendre jusqu'ici n'était que des conseils, utiles certes, mais d'une navrante banalité, prouvant s'il le fallait encore l'impuissance de la science devant cette maladie.

J'ai eu  souvent l'impression d'être pris pour un débile ou un enfant à qui on essayait d'expliquer des choses  trop compliquées. C'est ce que doit ressentir  un alcoolique qui assiste pour la première fois à une thérapie anonyme et collective ..

Vos avis et conseils pertinents, précis et constructifs tranchent nettement avec cette approche "commisérative" et, pour cela,  je vous en remercie.

I JR 

Marie-Hélène Isern-Réal Avocate 4 mars 2024 18:46

refus de soins  

Bonjour Irénée,

Vos remerciements me touchent beaucoup et je vais vous dire pourquoi.

Ce site fait appel à des professionnels expérimentés, qui ont vécu professionnellement ce que vous exprimez. C'est cette expérience que nous essayons de mettre à votre service.

Toute personne qui demande l'intervention d'un professionnel doit savoir que sa question va enrichir les réponses à tous les autres, c'est pourquoi, il ne faut pas hésiter et ce qui fait toute la richesse de ce site.

Je suis contente d'apprendre que j'ai pu vous aider.

 

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