Gérer le budget de son proche quand on est aidant

Gérer le budget de son proche quand on est aidant

Au moment où un proche perd sa capacité de décision, la question de la gestion de ses affaires devient cruciale. La combinaison entre protection de la liberté individuelle et la prise en charge est délicate, d’autant que le gestionnaire doit rendre des comptes et engage sa responsabilité. Comment accompagner la perte d’autonomie physique et intellectuelle de votre proche sans le faire souffrir, qu’il soit ou non sous protection judiciaire ?

La loi favorise le maintien de l’autonomie

La protection est instaurée et assurée dans le respect des libertés individuelles et des droits fondamentaux, notamment le respect de la dignité et de la volonté de la personne. Le juge des tutelles nomme un mandataire dans le but de rechercher quelle est la volonté de la personne et pour la mettre en œuvre. L’objectif de la protection est de garantir que l’intérêt de la personne protégée sera seul pris en compte. Il ne s’agit pas de protéger les intérêts de ses proches ou de sauvegarder leur héritage.

Son autonomie doit être favorisée. Connaissant l’attachement des personnes âgées à leur domicile, le législateur a prévu l’intervention d’un expert médical et l’autorisation du juge pour faire entrer la personne protégée en maison de retraite et la possibilité de lui laisser la libre disposition de ses comptes autant que faire se peut. Ces principes sont évidemment applicables à toute personne âgée, qu’elle soit ou non sous protection judiciaire, à son domicile ou en établissement.

Cependant, qui dit autonomie ne dit pas abandon. La gestion d’affaire est une obligation des familles et de la collectivité publique. Elle rend indispensable d’assurer le paiement des charges et la préservation du patrimoine afin qu’ils soient affectés à la personne et à son bien-être.

Comment cela se passe quand la personne n’est pas sous protection judiciaire ?

Prendre en main les affaires de son proche dépendant engage la responsabilité de l’aidant familial qui aura à rendre des comptes à son parent. Ce dernier doit en effet collaborer et approuver les actes signés en son nom. Lui faire signer des chèques à l’aveuglette peut être dangereux et contesté. La contestation provient des autres membres de l’entourage qui deviennent suspicieux et saisissent le juge des tutelles afin de mettre en place une protection judiciaire. Il sera alors nécessaire de justifier, documents à l’appui, de la justesse des dépenses effectuées, et l’affectation des sorties d’argent dans l’intérêt de la personne aidée. Il est donc indispensable de tenir une comptabilité et ne pas mélanger les comptes de l’aidant et de l’aidé.

Les relations avec l’employé(e) de maison deviennent parfois délicates. La personne âgée a ses habitudes qu’il est parfois difficile de modifier. Il est nécessaire d’exiger de payer par chèque emploi service et ne jamais oublier que la personne âgée est l’employeur avec toutes les obligations que cela implique sans omettre de la déclarer. Un contrat écrit, avec les heures et les tâches à accomplir, doit être soigneusement rédigé. Même si les paiements sont effectués par la personne elle-même, il est bon de prendre de l’autorité sur l’employé(e).

Comment faciliter la gestion ? La procuration sur les comptes bancaires permet à un proche de signer à la place de la personne en cas d’impossibilité, au cours d’une hospitalisation par exemple. La mise en place des paiements par virements quant à elle, allège les tâches administratives. Une surveillance discrète peut ainsi être mise en œuvre en obtenant l’accès aux comptes par Internet. On peut également répondre aux demandes de conseils et d’aides en effectuant les déclarations fiscales et le petit secrétariat. La contrainte peut s’instaurer légèrement, sous la forme de conseils et de mise en application des décisions prises par la personne aidée. Il est bon parfois de faire appel à un secrétariat extérieur qui, en qualité de professionnel, sera mieux toléré qu’un proche et qui pourra alerter s’il constate des anomalies.

La désignation de la personne de confiance sur le plan médical ne permet pas en principe d’avoir accès aux formalités administratives. Si le proche a des biens à gérer comme des loyers par exemple, il serait bon de se faire donner procuration pour relancer les locataires.

Souvent la personne âgée vit dans la routine et ses débiteurs en abusent. Si la gestion est complexe, une procuration générale notariée ou un mandat de protection future par acte d’avocat est recommandé.

Comment éviter les conflits ? La collaboration de tous les proches concernés en fonction de leur disponibilité et capacité est recommandée. D’abord, pour répartir la tâche qui est parfois très lourde. Ensuite, pour des raisons de transparence. Cette collaboration évitera les contestations abusives et gravement perturbatrices. Malheureusement, souvent, celui parmi les proches qui refuse de collaborer est celui qui entretient la contestation. Il n’y a pas grand-chose à faire pour combattre une telle attitude, si ce n’est saisir le juge des tutelles pour qu’il organise officiellement la protection.

Et si la personne est sous protection judiciaire ?

Sous sauvegarde, le mandataire spécial, s’il a été nommé, reçoit pour mission de faire inventaire, de prendre la main sur les comptes et d’assurer les paiements. Pour ce faire, il appréhende tout le courrier. Il s’agit d’une mesure en urgence, très lourde, d’autant qu’elle peut se faire sans l’accord de la personne protégée qui perd ainsi le contrôle aussi bien de ses ressources que de son patrimoine. Ce mandat est provisoire.

Sous curatelle simple la personne gère elle-même son budget et affecte ses ressources au paiement de ses charges. Elle n’a d’assistance de son curateur que pour les actes importants qui engagent son patrimoine comme les ventes ou la souscription d’emprunt. Il n’y a aucun contrôle du juge. Il est prudent pour le curateur de faire un inventaire du patrimoine afin d’apporter la preuve, en cas de besoin, qu’il a effectué un contrôle sérieux des actes de disposition sur les biens de son protégé et notamment le placement judicieux de l’épargne.

Sous curatelle renforcée, le curateur reçoit pour mission d’appréhender les ressources pour payer les charges. Après avoir mis de côté une épargne de précaution, il doit laisser le surplus à la libre disposition de la personne protégée. Les comptes sont vérifiés une fois par an par le greffier en chef du tribunal. L’inventaire du patrimoine est obligatoire et doit être actualisé. Pour les placements, le curateur doit obtenir l’accord du protégé. Il a tout intérêt à se faire aider par un professionnel de gestion de patrimoine si ce dernier est important. En cas de litige entre le protecteur et le protégé, le juge des tutelles statue et autorise ou non l’acte. Sous tutelle aussi l’inventaire est obligatoire. Il doit être actualisé. Les comptes sont contrôlés par le greffier en chef annuellement. Mais pour les placements, les ventes et les emprunts, pour les transactions, acceptation de succession et tous les actes de disposition, l’autorisation du juge des tutelles est nécessaire.

On voit que la gestion du budget est inséparable de la gestion du patrimoine et la gestion administrative. Le régime de curatelle renforcée est en même temps le plus protecteur et le plus libéral. Le contrôle du juge garantit l’indépendance de la personne protégée mais aussi sa sécurité. Ceci explique pourquoi cette mesure est la plus fréquemment ordonnée. Le proche aidant devra toujours justifier qu’il a apporté à la gestion des soins prudents, diligents et avisés, dans l’intérêt de la personne protégée, finalement, comme il le ferait pour son propre intérêt.

 

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